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Décryptage

Faire un 3e cycle après une école d’art : "un accélérateur de carrière"

L'exposition photographique "Voir le vivant autrement" de Célia Boutilier au Jardin des serres d’Auteuil à Paris.
L'exposition photographique "Voir le vivant autrement" de Célia Boutilier au Jardin des serres d’Auteuil à Paris. © Clarisse Pillard
Par Isabelle Fagotat, publié le 13 juin 2025
1 min

DSRA, DSRD, doctorat… De plus en plus d’écoles d’art proposent des 3e cycles. Ces cursus qui mêlent recherche théorique et pratique artistique permettent aux étudiants d’approfondir leur démarche en s’ouvrant à d’autres disciplines. Ils leur offrent de la visibilité et élargissent leurs perspectives professionnelles.

Les programmes de 3e cycle en école supérieure d’art et de design sont relativement récents : les premières unités de recherche ont été mises en place au début des années 2000.

L’idée de créer un titre de DSRA (Diplôme supérieur de recherche en art) a quant à elle émergé à Annecy, en 2009 à l’ESAAA, en collaboration avec l’ENSBA Lyon.

"C’était pour nous un moyen de répondre à l’impératif institutionnel lié au processus de Bologne et à l’uniformisation de l’enseignement supérieur au niveau européen. On s’est interrogé sur ce que signifie faire de la recherche dans le champ artistique, pas seulement sur l’art mais à partir de l’art, dans l’art, afin de trouver des formats plastiques de mise en forme de la recherche", explique David Zerbib, enseignant à l’ESAAA.

Depuis, l’initiative a essaimé et de plus en plus d’écoles supérieures d’art et de design proposent des cursus de 3e cycle à leurs étudiants.

Diplôme d’école ou doctorat

À l’instar de l’ESAAA, certaines écoles, comme l’ESAD Orléans, ont créé des DSRA ou des DSRD (Diplôme supérieur de recherche en design), qui sont des diplômes d’établissement de niveau bac+8.

D’autres écoles ont souhaité s’adosser à des universités afin de pouvoir proposer des doctorats permettant d’obtenir le grade de docteur et bénéficiant d’une plus large reconnaissance au niveau national et international.

C‘est le cas notamment des doctorats PSL-SACRe (Sciences, arts, création, recherche) proposés par six écoles parisiennes* en lien avec l’université PSL (Paris sciences et lettres).

En Normandie, l’ésam Caen-Cherbourg, l’ésadhar Le Havre-Rouen et l’Ensa Normandie ont de leur côté mis sur pied le doctorat RADIAN (Recherche en art, design, innovation, architecture).

Exploration artistique et recherche scientifique

"Le programme doctoral est fondé sur l’articulation entre une recherche plastique aboutissant à une production artistique, et une recherche scientifique, avec une thèse plus classique, sur un format d’une centaine de pages. Il nourrit le travail de création par l’apport des sciences humaines", résume Arnaud Stinès, directeur de l’ésam.

Au-delà du document écrit, la thèse peut donc prendre, en fonction de la spécialité de l’artiste-chercheur, des formes diverses : exposition sonore, production d’œuvres plastiques, de films, sculpture, spectacle de danse…

Issu de l’ésam, Clément Hébert qui a obtenu son doctorat RADIAN en décembre 2024, a travaillé sur les habitats préfabriqués UK 100 qui ont permis de reloger la population normande après les bombardements de la 2e guerre mondiale. Pour nourrir sa thèse, il a rassemblé et mis en scène des archives, fabriqué des décors et réalisé un film.

Démarche pluridisciplinaire

Pour son doctorat SACRe-ENSBA en biologie et éthique de l’esthétique, l’artiste photographe Célia Boutilier a quant à elle travaillé sur la notion de symbiose, en partenariat avec un laboratoire de biologie situé au Muséum national d’histoire naturelle. Dans le cadre de sa thèse, elle a organisé, avec la ville de Paris, une exposition photographique "Voir le vivant autrement" au Jardin des serres d’Auteuil, visible jusqu’au 7 septembre.

"Pour candidater au programme doctoral SACRe, il faut d’abord créer son projet, qui doit venir de sa pratique plastique et d’autre part, faire un pont avec une autre pratique, une réflexion plus théorique, un laboratoire de recherche, etc.", explique-t-elle. Parce qu’ils se confrontent à de nouvelles disciplines et thématiques, de l’écologie au numérique, en passant par l’ingénierie ou la physique, les doctorants prennent de la hauteur sur leur pratique.

Dans le cadre de sa thèse, l'artiste photographe Célia Boutilier expose son travail "Voir le vivant autrement" au Jardin des serres d’Auteuil à Paris.
Dans le cadre de sa thèse, l'artiste photographe Célia Boutilier expose son travail "Voir le vivant autrement" au Jardin des serres d’Auteuil à Paris. © Célia Boutilier / Clarisse Pillard.

Développement d’une expertise

"Quand ils entrent en 3e cycle, ils restent à l’école mais évoluent dans un environnement professionnalisant. Cela a un impact sur leur savoir-être, ils acquièrent de nouvelles compétences et c’est un accélérateur pour leur carrière", analyse Emmanuel Mahé, directeur de la recherche de l’EnsAD.

L’obtention d’un diplôme de 3e cycle, équivalent au PhD américain, offre de nouvelles perspectives professionnelles : il peut permettre l’accès à des postes de direction en lien avec l’innovation, notamment dans le secteur industriel, au niveau national ou international.

Autre débouché naturel d’un doctorat : l’enseignement. Clément Hébert vient par exemple d’obtenir un poste d’ATER en art plastique à l’université de Lorraine.

"C’est un temps plein qui représente deux jours d’enseignement par semaine. C’est un bon compromis qui permet d’avoir des revenus et du temps pour la pratique artistique", souligne-t-il.

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